Tuesday, September 16, 2008

Orphée

Je me suis envoyé Orphée de Jean Cocteau (1950): pas transcendant. C'est plus proche du Testament d'Orphée (1960) que du Sang d'un Poète (1930) - remarque j'aurais pu m'en douter si j'avais un peu plus de jugeote... Plus proche donc d'un rafistolage de plaisanteries (méta-)poétiques d'un vieux Monsieur très convenable que des tâtonnements inspirés d'un amateur d'opium.

Une scène néanmoins a attiré mon attention, par la ressemblance qu'elle recèle avec mon travail de recherche. La Princesse de la Mort exhorte son chauffeur Heurtebise à faire usage de pouvoirs surnaturels pour renvoyer Orphée dans le monde des vivants, auprès de sa femme Eurydice. ("La Mort d'un poète," souligne Cocteau au passage, "doit se sacrifier pour le rendre immortel.") Heurtebise saisit la tête d'Orphée et ferme les yeux, concentré, tandis que la Mort l'encourage:

"
La Mort -- Travaillez, travaillez! Heurtebise je vous aide. Je travaille avec vous.
Ne faiblissez pas!
Comptez! Calculez! Acharnez-vous comme je m'acharne!
Allez: murez-le, il le faut!
Sans la volonté nous sommes des infirmes!
Allez, allez! Allez, allez!
Heurtebise -- Je ne peux pas.
M -- Il faut vouloir Heurtebise! Il le faut!
H -- Je ne peux pas.
M -- Vous travaillez mal. Ne me parlez plus. Enfoncez-vous en vous-mêmes.
Et quittez-vous! Courez! Courez! Volez! Renversez les obstacles!
Vous approchez... Vous arrivez! Je le vois.
H -- J'arrive.
M -- Un dernier effort Heurtebise. Faites-le. Faites-le! Y êtes-vous? Répondez-moi: y êtes-vous?
H -- J'y suis.
M -- Alors en route...
Remontez le temps! Il faut que ce qui a été ne soit plus!
(...)
H -- Je suis très fatigué..
M -- Je m'en moque! Travaillez! Travaillez je vous l'ordonne.
"
Ce genre d'encouragements serait tout à fait ce dont j'ai parfois besoin lorsque je me retrouve face à mon bureau recouvert de trois couches d'articles de physique théorique des hautes énergies...

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